L’histoire de House of Brol se raconte à deux voix, s’écrit à quatre mains, celles d’Alice De Mey, la brune, architecte d’intérieur de formation, et de Charlotte Antoine, la blonde, qui a bossé de nombreuses années dans l’humanitaire après des études d’économie. Aujourd’hui, ces deux drôles de dames sont à la tête d’un concept innovant de bar à perles-atelier-havre de paix convivial à un jet de pierre de la place Fernand Cocq. Du ‘brol’ de bien jolie facture.
Les deux jeunes femmes se connaissent depuis l’adolescence mais n’auraient jamais imaginé développer un projet commun. « Il n’y avait aucune préméditation ni à travailler ensemble ni à changer de carrière », précisent-elles. « Après avoir toutes les deux démissionné de nos anciens postes qui ne nous satisfaisaient plus pour de multiples raisons, nous nous sommes retrouvées à Bruxelles durant l’été 2024. Nous voulions l’une et l’autre nous accorder le temps de réfléchir à la suite, sans même imaginer changer de secteur. » Jusqu’à ce beau jour de septembre 2024 où, en promenade dans le quartier Flagey, elles se retrouvent dans une boutique des Petits Riens où elle passent un excellent moment à fouiller dans de grands bacs de perles, boutons, bijoux de fantaisie et autres colifichets dépareillés. Du ‘brol’ dans toute sa splendeur et dans toute sa poésie.
Une évidence entrepreneuriale
« L’idée nous est littéralement tombée dessus, puis tout s’est enchaîné naturellement », insistent-elles, même si elles envisagent le passage au statut d’entrepreneuse de manière différente. « J’ai grandi avec un père indépendant », précise Alice De Mey, « et dans mon parcours d’architecte d’intérieur, à 33 ans, soit j’ouvrais mon cabinet, soit je changeais de carrière. Je pense que j’ai la fibre entrepreneuriale. Pour moi, l’entrepreneuriat ne devrait en tout cas pas engendrer tant de peurs, de frustrations, de craintes. » Charlotte Antoine tempère : « Je ressentais l’envie de quitter le monde humanitaire. J’avais assez d’expertise pour m’installer comme consultante, la voie typique dans mon cas, mais cela aurait été un choix purement alimentaire. Je ne crois pas être une entrepreneuse dans l’âme. De plus, en tant que maman solo, je suis attachée à une certaine stabilité. »
Elles imaginent un lieu au cœur de la ville mais préservé de l’agitation urbaine où la clientèle pourrait choisir toutes les perles, ‘charms’ et autres composantes nécessaires à la réalisation de bijoux, chaînes de lunettes et accessoires à confectionner sur place avec les conseils des maîtresses des lieux tout en sirotant une boisson réconfortante.
Ode à la créativité et à la déconnexion
Pourtant, ni Alice ni Charlotte ne possédaient de compétences particulières en matière d’activités manuelles. « Nous ne sommes pas des expertes », confient-elles. « Le travail manuel n’a jamais constitué notre activité principale, ni même notre hobby préféré. Mais nous avons déjà touché un peu à tout, le crochet, la couture, la restauration de meubles… On nous demande souvent si nous sommes formées à la bijouterie. Pour le travail des perles, ce n’est pas nécessaire. Nous voulons décomplexer le concept en proposant un endroit où tout est accessible, les outils, les perles sans qu’il soit nécessaire d’acheter un stock de base coûteux par rapport à l’utilisation qui en sera faite. »
Les deux associées sont aussi liées par une conviction profonde et de plus en plus en vogue : s’éloigner de temps en temps de son téléphone ne peut que faire du bien. Pour elles, enchaîner les journées de travail face à son ordinateur et les moments de loisirs devant d’autres écrans n’a rien de souhaitable. « Nous essayons de proposer une activité manuelle qui ne demande pas de prérequis technique », indiquent-elles, « qui soit accessible à tous les âges, qui éloigne des écrans et permette de prendre du temps pour soi. »
Un weekend au féminin avec hub.brussels
De la théorie à la pratique, il n’y a eu qu’un pas et quelques semaines pour le duo solidement épaulé par hub.brussels. « J’avais entendu parler de hub.brussels par des amis », précise Alice De Mey. « JobYourself leur avait été très utile au moment d’adopter le statut d’indépendant. Cet outil ne nous correspondait pas mais hub.brussels nous a proposé de participer fin novembre 2024 à ‘Deux jours pour concrétiser votre projet’, un colloque réservé aux femmes. Nous nous sommes retrouvées entourées d’une vingtaine de participantes fantastiques, elles aussi en train de changer de vie, de créer leur projet. C’est étonnant à quel point l’entrepreneuriat surtout féminin à Bruxelles est un petit univers.
Ce fut un weekend très important pour nous parce que c’était la première fois que nous présentions notre concept à quelqu’un d’extérieur, de neutre et ayant pour objectif d’aider des projets viables. Pendant ces deux jours, nous avons été remises en question, nos hypothèses ont été challengées. Constater grâce aux réactions enthousiastes tant de l’équipe de hub.brussels que des autres participantes que notre projet n’était pas juste un délire entre copines nous a fait beaucoup de bien. Nous avons ainsi pu amorcer le contact avec hub.brussels, rencontrer l’équipe, être orientées vers des personnes au sein des services juridiques et retail vraiment à même de nous accompagner dans toutes les spécificités de notre projet. » C’est notamment hub.brussels qui les encouragera à interroger leur public cible sur ses besoins et ses attentes en matière de loisirs.
Dans la galaxie bruxelloise
Mais les deux jeunes femmes ressentent aussi le besoin d’un accompagnement plus quotidien car, insiste Charlotte Antoine, « les business plans, c’est bien sur papier, mais tellement différent de la pratique ! » Avec l’aide de hub.brussels, elles se tournent vers un conseiller du GEL (guichet d’économie locale) qui leur offre un accompagnement très détaillé et les aide à décrocher la prime pour indépendant d’Actiris. Parallèlement, elles continuent à consulter les équipes de hub.brussels pour les questions très précises, de niche. « Nos liens directs avec hub.brussels pourraient sembler un peu distendus », constatent-elles. « Les contacts interpersonnels se sont espacés mais nous nous rendons compte que les différents services d’aide à l’entrepreneuriat sont interconnectés, que notre conseiller GEL discute de notre cas avec ses collègues de hub.brussels. Nous restons dans la bulle de hub.brussels. »
Et un an plus tard
House of Brol voit donc le jour un an tout juste après que l’idée ait germé dans l’esprit de ses deux créatrices. En moins de douze mois, elles se sont partagé les tâches, l’administration pour Charlotte Antoine, le côté créatif pour Alice De Mey. Elles ont trouvé un local clair, spacieux, proche de chez elles et conforme aux attentes de leur clientèle près de la place Fernand Cocq.
Depuis septembre 2025, elles accueillent une clientèle jusqu’ici essentiellement féminine — mais ces messieurs sont évidemment les bienvenus — avec une gamme de plusieurs centaines de références, un salon-atelier convivial où créer en sirotant une boisson réconfortante, et des horaires élargis six jours par semaine. Et cela marche ! Une clientèle fidèle est déjà en train de se créer et divers événements sont au programme.
Mais les deux entrepreneuses ont un message à passer à celles et ceux que leur parcours inspirerait : « Nous avons abordé ce projet avec de l’argent de côté, notre propre logement, le soutien de notre famille, bref dans une position privilégiée qui n’est pas donnée à tout le monde. Il est facile de dire ‘lancez-vous’. Oui, lancez-vous, certes, mais en connaissance de cause. Ne soyez pas naïf.ve, ne vous lancez pas si vous n’avez pas les reins solides et un peu d’appétit pour le risque. »